lundi 26 novembre 2007

Une urgence à monter cette pièce

Dans ce conte déjanté qui nous renvoie aux jeux parfois cruels de notre enfance, Radovan Ivsic développe une satire du despotisme et une dénonciation de l’arbitraire. La truculence des personnages, l’intemporalité et le rythme de la langue, le jeu des symboles, l’affrontement du rêve et de la réalité, la confrontation des thèmes universels du pouvoir, de l’amour et de la mort, sont autant d’éléments qui rapprochent l’oeuvre de Radovan Ivsic des grandes tragi - comédies de Shakespeare.

Tous les ingrédients du conte de fées dont nous avons été pétris sont là : une princesse séquestrée dans une tour, un chevalier archétype du sauveur sans peur et sans reproche, un prince amoureux transi, un fou à la lucidité déroutante, un esprit de la forêt gardien de la vérité, un roi tyrannique ayant usurpé le trône,…

Néanmoins, la parole de l’auteur résonne aujourd’hui non seulement dans notre conscience collective d’adulte, mais également dans les déviances de nos sociétés modernes. À l’heure où des génocides continuent d’être perpétrés, où l’économie conditionne la vie de chacun et renforce les individualismes, où le pouvoir se veut invisible mais reste concentré dans les mains de certaines puissances mondiales hégémoniques, l’humour et la noirceur de ce texte au propos simplement humaniste font souffler sur nos têtes un vent de fraîcheur pertinente.

Ainsi le roi Gordogane, tyran ubuesque, rêve notamment de devenir invisible pour mieux exercer son régime de terreur et en voir augmenter sa jouissance personnelle. Et, au fil de l’histoire, chacun des personnages se voit emporté dans le tourbillon des individualismes et vient finalement contribuer au « bon fonctionnement » de la machine totalitaire. Même l’amour, s’il reste sauf, ne parvient pas à lutter contre la folie destructrice.

Il s’agit là, à mon sens, d’un texte d’utilité publique à partager avec les spectateurs de générations confondues.

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